Un avis sur la question : positif
(Michel Chardavoine)
Un avis sur la question : positif.
Depuis 5 ans seulement, les maîtres de cycle 3 de l'école ont choisi, puis reconduit, l'organisation de classes de cycles parallèles "multi-âges" (quatre d'abord, puis trois suite à une fermeture de poste). Ce choix faisait suite à la mise en place systématique de classes à "cours-doubles" pour tous les enfants de l'école (130 élèves environ), afin de mettre fin aux palabres sans fin et incohérents en fin d'année scolaire pour constituer les groupes. La classe à cours simple était vécue comme "normale, pure" pour les collègues, efficace pour les parents ; celle au cours double "compliquée et inefficace, impure" pour les uns, "rurale et pénalisante" pour les autres : rurale au mauvais sens (citadin :-) du terme, c'est-à-dire anachronique).
Cette dimension - répartir les enfants en groupes-classes - semble dérisoire : pourtant, les propos échangés dans la salle des maîtres témoignaient davantage d'un prétendu confort du maître ("J'ai passé suffisamment de temps dans des cours multiples, pour maintenant préférer un cours 'simple'"...) que d'une préoccupation des élèves... et étaient bien éloignés de l'esprit de la loi d'orientation de 1989...
Non seulement, les classes doubles ont été bien appréciées par les enfants et les parents, mais les réserves faites étaient qu'elles ne soient que doubles ! Les maîtres étaient favorables dans leur majorité. Nous avons donc décidé, en conseil des maîtres d'organiser des classes de cycle 3 ; cependant, il nous paraissait clair que la classe de cycle ne pouvait pas être une classe à cours multiples :
- pour des raisons matérielles : il n'est pas possible de préparer et d'animer trois groupes différents 6 heures sur 6.
- pour des raisons pédagogiques : les enfants des classes ne proviennent pas d'un moule standard : la 'valeur' n'est pas toujours proportionnelle au nombre des années ; un enfant est rarement bon à rien, ni mauvais à tout ; les rythmes, les rapports aux savoirs varient selon les enfants, etc. : le mythe de l'enfant "moyen" ne peut plus être retenu.
Nous avons donc tenu à présenter nos classes comme des classes "à cycle simple", pour plagier l'appellation traditionnelle : mais au-delà de la boutade, c'était pour signifier à tous, collègues, parents, élèves, que l'objectif de la classe était le même pour tous les élèves : celui d'en sortir, pour
aller au collège, avec un maximum de chances d'y faire un parcours réussi.
Aussi, les appellations Ce2, Cm1, Cm2, nous apparaissaient - et nous apparaissent toujours - comme des obstacles pour envisager le 'séjour' de l'enfant dans le cycle sans une durée pré-déterminée à l'avance : ni 2, ni 3, ni 4 ans. Il ne s'agit plus (C'est l'imparfait, non le présent, qui devrait être employé : il y a plus de 10 ans que cela aurait dû avoir lieu...) de sauter une classe, ni d'en redoubler une, mais d'organiser la classe pour proposer des parcours plus ou moins rapides, sachant que cette souplesse n'existe plus si une équipe de maîtres a déjà utilisé ce joker au cycle 2.
Substituer à ces appellations d'autres mots tels que "année 1, année 2, année 3" comme l'ont fait la plupart des éditeurs est une supercherie : rien ne serait changé.
Pour cela, nous avons préféré voir dans nos classes 3 groupes d'enfants :
- ceux qui viennent du cycle 2, qui ont devant eux 2, 3 ou 4 ans de cycle 3.
- ceux qui doivent quitter le cycle 3 à la fin de l'année (selon les compétences ou ancienneté cycle2 + cycle3).
- les autres qui avaient déjà fait du cycle 3, mais dont le conseil des maîtres ne pronostiquait pas un passage immédiat en 6ème (sans que cette décision soit irrévocable) .
Pour le suivi des élèves, il y a ceux qui sont en 1ère année, en 2ème année, en 3ème année, 4ème année : nos années n'indiquent pas un niveau quelconque, mais une durée de temps passée dans le cycle.
Les modalités de fonctionnement peuvent se résumer aux mots : compétences, différenciation ; coopération, autonomie. Je suis prêt à les évoquer avec ceux que cela intéresse.
Pour en revenir aux intérêts que présentent ces classes multi-âges (ce sont les maîtres des classes 'rurales', quelquefois uniques, qui vont rigoler en me voyant tenter de décrire ce qu'ils organisent parfois depuis longtemps dans leurs classes ! ) :
- une gestion plus facile des fluctuations des effectifs dans l'année scolaire.
- une éducation permanente à la différence : les grands apprennent à respecter les plus jeunes, les jeunes profitent de l'expérience des anciens, ils travaillent et jouent ensemble...
- une dynamisation du groupe : un grand est souvent piqué au vif lorsque la réponse est donnée par un plus jeune ; les plus jeunes sont souvent impatients d'accéder au savoir des grands.
- une prise en compte plus évidente des différences : elles s'imposent au maître.
- une acceptation plus facile de la difficulté, de la part de l'enfant en échec lui-même et de la part des autres : l'enfant en échec n'est plus à l'index, ni écarté de son groupe de référence ; le non-savoir n'est pas signe d'incapacité ni d'échec fatal, mais une étape dans l'apprentissage : on peut continuer à apprendre même si on est grand.
- une démultiplication de l'action du maître : même s'il ne participe directement à une activité donnée, l'enfant l'entend, la voit et la reconnaît lorsqu'elle lui est présentée plus tard; quand ce n'est pas qu'il intervient à bon escient alors qu'il semblait pris dans une autre tâche.
- une grande richesse des échanges, due à cette différence des âges. La mise en perspective des apprentissages dans les projets est particulièrement fructueuse car les éclairages et / ou sensibilités des uns et des autres se complètent parfaitement.
En ce qui concerne nos jeunes collègues, PE2 ou même PE1, la gestion de la classe ne leur a posé aucun problème spécifique. Je suis en école d'application : les PE-T1 ( Professeurs des Écoles sur le Terrain pour la première année : je trouve ce mot nouveau particulièrement poétique et moderne) sont même séduits par la simplicité de cette gestion : en effet le discours de trop nombreux formateurs (Piufms, Ipemfs) décrit encore le maître comme un technicien champion du cloisonnement des savoirs et des élèves et transmet cette représentation aux professeurs-stagiaires.
C'est un peu plus difficile pour nos remplaçants, car les bruits vont vite et ces classes de cycles font de notre école une usine à gaz insensée.
Ils viennent donc parfois avec des a priori défavorables.
Quand nous pouvons les voir pour leur transmettre les usages de la classe, c'est forcément plus facile que lorsqu'il faut leur expliquer le fonctionnement par écrit. Tous ont survécu, certains sont revenus.
Ceci n'est pas propre à ce type de classe.
Les inconvénients :
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Les difficultés :
- L'incompréhension des enfants lorsqu'il faut envoyer à la piscine seulement les enfants du CE2 ( appellation qui n'est plus du tout contrôlée, et encore moins définie dans les textes en vigueur) alors que certains savent parfaitement nager, contrairement à quelques copains du CM1 ou CM2 (J'aimerais qu'on m'indique comment faire pour reconnaître les uns des autres ! ) ...
L'esprit des cycles, le bon sens tout simplement, ne se devait-il pas de recenser les non-nageurs ?
- Notre difficulté, il y a deux ans je crois, lorsqu'il a fallu, dans notre département, réserver le cours d'anglais aux cm2. Nous n'avions pas de ligne de crédit pour acheter des boules Quiès...
- L'obligation, jusqu'à l'an dernier, de ventiler les élèves de cycle 3 dans les colonnes ce2, cm1, cm2 pour l'enquête dite de rentrée : il a fallu recréer artificiellement ces divisions.
- L'opposition des Atsem de s'occuper des pinceaux des CP dans un atelier comprenant des GS-CP (les GS relevaient de l'école maternelle, les CP de l'école primaire mitoyenne) : leur nombre ne dépend que du nombre de classes maternelles.
Michel C.
Ecole Élémentaire d'Application «Pierre de Coubertin»
72, rue Sarrazine
79000 NIORT