
La parole de l'élève en classe (cf. Intention du colloque)
Découvrez, un peu avant le colloque, qui sont ces enseignants qui vous ouvrent la porte de leur classe, ainsi que le parcours de notre conférencier
Conférence de : Jean Le Gall, interviewé par Sylvain Connac
Instituteur, dans une école de la banlieue nantaise, j’entre en pédagogie Freinet en 1959. Très vite, je prends contact avec Freinet et j’échange longuement avec lui sur les droits de l’enfant et leur participation démocratique aux décisions dans la classe coopérative. Cette dimension éducative et politique de la pédagogie Freinet va demeurer mon engagement principal d’action avec les enfants pendant une trentaine d’années.
Afin de leur permettre d’exercer un pouvoir de plus en plus important sur leur vie sociale, leurs apprentissages, leurs activités, je vais étudier les expériences des pionniers de l’Education nouvelle, de l’Ecole socialiste et de l’Education libertaire 3et mettre en œuvre, dès 1965, une expérimentation d’autogestion
Cependant mon action, en ce qui concerne les enfants, se limite à l’école. La Convention internationale des droits de l’enfant, adoptée par les Nations Unies, le 20 novembre 1989, va m’amener à élargir mon champ d’action. Elle reconnaît en effet aux enfants des libertés fondamentales qu’ils doivent pouvoir exercer dans tous les lieux qui les accueillent. Ils sont désormais des citoyens pouvant participer aux décisions qui les concernent.
Présentations de classe :
Présenter sa classe est l'occasion d'adopter une démarche réflexive sur son travail et de s'engager dans une posture professionnelle authentique. Ceux qui ont partagé leur expérience soulignent les avantages de cette analyse et de ce processus de construction. L'objectif n'est pas de montrer une classe parfaite, mais plutôt d'explorer des possibilités et de partager des pratiques pédagogiques.
Les participants seront incités à partager leurs travaux et expériences sur l'adaptation et le renforcement de la coopération et de l'inclusion dans leurs contextes éducatifs, à travers des ateliers auto-gérés.
Angélique Libbrecht : classe d'Élémentaire
Je suis Angélique Libbrecht, institutrice en deuxième primaire en Belgique depuis dix ans, après avoir enseigné dans toutes les classes de la 2e à la 6e primaire. Passer de la P6 à la P2 a été une révélation : impossible pour moi de parler aux enfants comme à des “petits”. Je les considère toujours comme des égaux, dont la parole a de la valeur.
J’ai vécu une expérience marquante dans une école internationale en Suisse, avec internat. Vivre avec mes élèves au quotidien m’a permis de les voir autrement, de manière globale, et de comprendre combien leur parole est un levier puissant pour progresser dans notre métier. Dans ma classe, l’entraide, le respect des différences et la solidarité sont des piliers, et je participe aux temps de “Quoi de neuf” et textes libres à égalité avec eux.
Certaines expériences ont profondément marqué ma réflexion, comme le décès brutal d’une enfant de six ans, ou encore le parcours de mon papa, devenu tétraplégique et privé de parole après un AVC, qui a retrouvé sa voix grâce au temps, à la patience et au soutien familial. Ces expériences me rappellent l’importance de laisser la place, le temps et la confiance aux enfants, même les plus fragiles ou malades.
À l’heure des réseaux sociaux et des interactions souvent virtuelles, je crois plus que jamais à la force des liens humains réels, qui fondent la confiance, l’estime de soi et la coopération.
Julie Lefort : En collège
Julie Lefort, professeure de mathématiques en collège depuis une vingtaine d’année.
Très tôt, je me suis interrogée sur mon rôle auprès des élèves en difficulté. Reproduire l’école que j’avais connue m’a vite paru inefficace. Entre la croyance en l’égalité des chances et la conviction que chaque enfant est unique, j’ai compris que l’échec scolaire est avant tout une construction du système.
Plutôt que de blâmer le manque de motivation des élèves, j’ai choisi d’agir : lectures pédagogiques, engagement dans des collectifs comme l’ICEM34 et les Cahiers pédagogiques, participation à l’IREM de Montpellier.
Aujourd’hui, mes réflexions se concentrent sur deux axes : la coopération et le travail langagier. Je suis convaincue que partir des représentations des élèves et leur donner la parole est une clé pour favoriser les apprentissages.
Julie Hérault : Élémentaire cycle 3
Je suis professeure des écoles depuis 11 ans. Après avoir passé 5 ans sur Toulouse, cela fait maintenant 6 ans que je suis sur Lyon et en Rep+.
A Toulouse, j’ai enseigné dans une école qui fonctionnait par cycles. Ils avaient des classes de PS/MS/GS, CP/CE1 et CE2/CM1/CM2. Ils fonctionnaient avec des brevets de compétences, pratiquaient la communication non violente et les conseils de coopération. C’est ainsi que j’ai découvert les pédagogies coopératives et que j’ai pu constater ce que cela apportait aux élèves.
Depuis 5 ans, j’enseigne à des cycles 3 avec des variations dans les niveaux mais toujours en double ou triple niveau.
Il me semble que la coopération prend tout son sens dans une classe multi-âge et c’est pourquoi elle fait partie intégrante de mon enseignement.
Dans ma classe, les élèves apprennent à coopérer dans le cadre de la mise en place de projets (écriture et publication d'un journal de classe, création de podcasts et reportages radio...), mais aussi grâce à la mise en place d'instances dans la vie de la classe comme le conseil de coopération. C’est un temps où chacun peut participer à la vie de la classe en faisant des propositions. Mais c’est un temps qui sert aussi à souder la classe notamment avec le bilan météo de la semaine ou les félicitations.
Ce sont des moments importants, et attendus par les élèves, qui mettent en jeu différents apprentissages mais offrent par la même occasion des espaces de parole. Je trouve que cela a toute son importance dans une école en Rep+ et que cela joue grandement sur le climat de classe car les élèves apprennent à communiquer entre eux.
Ces espaces de parole amènent les élèves à s’écouter, à être sensibles les uns aux autres. Cela permet aussi à certains enfants de prendre confiance en eux et d’oser plus prendre leur place dans le groupe et dans les apprentissages. Des élèves qui parlaient peu en début d’année se sont mis à participer de plus en plus.
Depuis deux ans, je suis dans une nouvelle école avec des CM1-CM2 qui n’ont pas l’habitude de travailler avec des pédagogies coopératives. Je ne voulais pas bouleverser leur façon d’apprendre sans avoir pris le temps de questionner mes pratiques et de me demander pourquoi elles me tenaient à cœur. Il fallait aussi réfléchir à la façon d’en parler aux élèves, aux parents et aux collègues.
Vous l’aurez compris, la parole des élèves a une grande importance dans mon enseignement, j’ai commencé à vous expliquer pourquoi ici mais je serai ravie de vous montrer ce que cela donne dans ma classe lors du colloque.
