L’école est-elle un lieu démocratique ou un espace d’apprentissage de la démocratie ?
« Le gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple » (A. Lincoln)
D’un côté, la classe serait un espace d’apprentissage de la démocratie, de fait, dans le sens où, dans un espace démocratique, tout le monde est sur le même pied d’égalité. Or, l’enseignant n’est pas un pair, ne serait-ce que parce qu’on lui a confié des responsabilités, qu’il est garant d’un certain nombre de fonctions, qu’il est en mesure d’user d’un droit de veto, … La démocratie n’est pas ce qui vient en premier dans une classe, tant il y a de choses à tenir du point de vue de l’enseignant. En plus, notre passif d’élève peut nous pousser à aller à l’encontre de cette éducation à la démocratie.
A l’inverse, la classe coopérative serait un espace démocratique dans le sens où la démocratie ne peut s’apprendre qu’en la pratiquant réellement et le plus intensément possible, que lui conférer le statut de lieu d’apprentissage pourrait conduire à en faire un espace anti-démocratique.
Tout dépend en fait de ce que l’on met sous le terme de démocratie, qui a plusieurs formes. Dans nos pays occidentaux, elle prend surtout la forme de démocratie représentative, ce qui pourrait correspondre à un chèque en blanc donné à des personnes. Est-ce pour autant de l’ordre démocratique ? Vit-on l’expérience sachant qu’elle est tronquée ? Wilson Churchill : "La démocratie est le moins pire des gouvernements." On pourrait plutôt se demander si la classe est un espace de liberté ou un lieu d’apprentissage de la liberté.
Trois types de démocratie :
- La démocratie représentative : régime politique dans lequel on reconnaît à un organisme le droit de représenter une nation ou une communauté. La volonté des citoyens s’exprime par la médiation de représentants élus qui incarnent la volonté générale, votent la loi, et contrôlent éventuellement le gouvernement.
- La démocratie participative : système mixte dans lequel le peuple délègue son pouvoir tout en le conservant (le peuple se saisit lui-même directement de telles questions, via une pétition d'une fraction du corps électoral ou d'une interactivité sous forme de débats de proximité).
- La démocratie directe : régime dans lequel le peuple adopte lui-même les lois et décisions importantes et choisit lui-même les agents d'exécution.
Quoi qu’il en soit, il importe de ne pas leurrer les enfants quant à ce qu’ils peuvent faire ou ne pas faire. Le cadre peut être sécurisant, le contraire peut ne pas l’être. Les enfants doivent clairement savoir qu’il ne leur sera pas possible d’outrepasser des lois auxquelles ils n’ont pas accès mais qu’ils peuvent penser, élaborer puis modifier si nécessaire celles qui les concernent exclusivement. On peut alors appeler ces lois particulières « règles de vie. »
De plus, certains enfants ne sont pas armés pour vivre les contraintes inhérentes aux réalités démocratiques, le fait par exemple de ne pas directement aboutir dans ces projets ou de se retrouver au sein d’une structure complexe où tout ne provient pas d’un enseignant. En même temps que des droits, les enfants ont des devoirs, des obligations. Ils peuvent compter sur des libertés, mais aussi sur des responsabilités.
La liberté d’expression et l’autodétermination (avoir envie de dire je) seraient deux éléments au centre de tout espace souhaitant développer de l’apprentissage à la démocratie.
La classe pourrait alors être un espace d’éducation à la démocratie à condition qu’elle soit dans sa structure un espace démocratique. Cela peut se traduire par le fait de disposer en tant qu’enfant :
- D’un accès partagé à la parole,
- De la construction des lois qui régissent nos fonctionnements,
- D’un certain nombre de libertés (se déplacer, parler, choisir son travail, ses voisins, …),
- De l’exercice de responsabilités,
- De la gestion des conflits et le refus de la violence.
L’ensemble de ces situations permet le développement d’une force d’apprentissage qui ne serait pas apparue par l’intermédiaire de situations plus artificielles. Ne pas organiser la classe en espace démocratique serait se priver d’une telle énergie.
Par l’intermédiaire de la place que le maître peut occuper dans la classe, il peut à son tour devenir un vecteur d’apprentissage de la démocratie. Par exemple, pour la maîtrise du temps. Ainsi donc et dans un cadre démocratique précis et accepté, l’enseignant gagne à participer à l’entreprise coopérative dans le sens où il va permettre aux enfants de se construire des agir de citoyen rencontrant des personnes qui ont des responsabilités plus grandes, sans que cela soit vécu comme une contrainte.
La classe serait au final un lieu d’expérimentation. Avec la classe coopérative, on propose aux enfants de faire l’expérience de la démocratie, avec sa dangerosité potentielle. Il va s’agir d’engager un travail qui introduit des dispositifs avec une moindre prise de risque. Le maître gagne à se décaler de manière à ce que des comportements puissent se développer avec le moins de risque possible. On permet aux enfants de vivre ce que l’on se permet de vivre en tant qu’enseignant dans nos actions citoyennes et militantes.
Présents : Gilles, Franck, Frida, Pierre, Cédric S., Kathy, Sylvaine, Mireille, Leyla, Sylvain, Florence, Mélanie